Cent milliards de dollars! si Facebook était cotée en bourse à Paris, ce serait la plus grosse valorisation du Cac40. Vous me direz qu'avec des si on mettrait Paris en bouteille et que c'est pas avec des projets fiscaux comme taxer les revenus de plus d'un million d'euro par an qu'on va attirer des gars comme Mark Zuckerberg.
Quasiment tous les blogs consacrés à l'économie ou à la finance se sont fendus d'au moins deux billets sur cette introduction. Cela ressemblait un peu à la bande dessinée racontant les aventures de Martine; "Facebook va-t-il s'introduire en bourse", puis "à quel prix va-t-il le faire" ou "y aura-t-il une grosse demande" et enfin "Facebook s'est cassé la gueule comme je l'avais prévu dans un ancien billet" (sauf qu'on ne trouve jamais ce soit-disant billet) on a même atteint le "Facebook peut-il faire faillite?" à mettre au crédit (si j'ose dire) du site lesinrocks (ici). Je suppose qu'aujourd'hui tous ces gars, si sûr d'eux, doivent être millionnaires grâce à des ventes à découvert initiées au premier jour de la cotation ou mieux en ayant acheté des options de vente ou des warrants.
Même des domaines concernant la vie privée ont été relevés comme l'abandon de la nationalité américaine par un des gros actionnaires du site pour des raisons fiscales selon la presse (un citoyen américain doit payer l’impôt fédéral sur le revenu même si il réside à l'étranger), la tenue vestimentaire de Mark Zuckerberg; il parait que le survêtement à capuche est une marque d'irrespect pour les investisseurs ou son mariage célébré le lendemain de l'introduction en bourse pour des raisons patrimoniales, toujours selon la presse (en cas de divorce Madame Zuckerberg n'aurait pas droit à 50% du patrimoine du couple).
La critique de cette introduction ratée étant devenue un exercice de style pour tout blogueur de la finance ou journaliste, je vais donc me plier sans grande conviction mais de manière un peu plus originale que mes confrères, en essayant de les prendre à contre-pied. Sans conviction car je considère que cette IPO (Initial Public Offering) n'a pas d'intérêt particuliers; des entreprises naissent, croissent, entrent en bourse, d'autres déclinent, font faillites et disparaissent des listes des cotations boursières. C'est la vie normal du capitalisme et le jour où cela s’arrêtera et que tout restera figé, c'est que quelque chose ne tournera plus rond sur planète finance. Une société, si grosse soit-elle, qui se ramasse un gadin le premier jour de sa cotation, c'est pas la fin du capitalisme.
Deux reproches reviennent en boucle concernant cette introduction: une valorisation trop élevée de la société et des informations de dernière minutes venant des banques chargées de cette mise sur le marché qui n'auraient bénéficié qu'à quelques gros clients et non rendu public, en somme un délit d'initiés.
Selon l'expression consacrée, je ne commenterais pas une affaire où la justice a été saisie et alors que les personnes mises en cause rejettent ces accusations bla bla bla: A moins d'être un de ces éventuels initiés il est difficile de donner de manière sérieuse un avis sur le sujet. La seule chose que je sais est que la justice américaine a souvent la main lourde et que l'air du temps n'est ni à la clémence ni au pardon pour les fat cat qui trichent. Ceux qui auraient fauté, si cela est prouvé, n'emporteront surement pas leurs plus-values, bonus et commissions au paradis. Et qu'on ne vienne pas me dire que les gros s'en sortent toujours, il suffit de voir le cas Enron et le sort réservé à ses ancien dirigeants pour s'en convaincre.
Un titre sur-valorisé? Pas évident
Un titre valorisé à 30 fois ses revenus, 100 fois ses bénéfices serait une folie entend-t-on. Sauf qu'une société ne se valorise pas selon ses résultats passés mais selon des prévision de chiffres futurs et l'on sait par expérience qu'une croissance des résultats exponentielle dans le monde de l'internet n'a rien d’exceptionnel. C'est d'ailleurs le même type de reproches qui avaient été adressé à Google lors de son introduction sur le marché en 2004, aujourd’hui l' action vaut 7 fois plus (600 dollars) est distribue des dividendes en croissance régulières. Ceux qui en ont souscrit à l'époque, et qu'on moquait, rient bien fort aujourd'hui. Pus récemment le réseau social professionnel LinkedIn a vu son titre bondir de 109% le premier jour de son introduction. Pourquoi des petits génies de l'informatique feraient-il un cadeau à des investisseurs incapables peut-être de programmer "Hello world" en Basic?
Valoriser une société est un exercice d'autant plus difficile que la société évaluée est singulière. Facebook évolue sur un marché en pleine évolution, n'a pas de concurrent équivalent pouvant servir de benchmark (le sympathique site faceporn.com malgré la ressemblance du nom est très différent) et est en situation de monopole mondial (si l'on exclu la Chine).
Une fois l'évaluation de la valeur de la société faite, il faut fixer le prix auquel elle sera proposée au publique et la part des actions que céderont les actionnaires d'origines. En générale les banque se laissent une marge; en fixant un prix inférieur de 10% au prix d'évaluation on s'assure une progression des cours de bourse la semaine qui suit l'introduction.Tout le monde est gagnant, l'investisseur qui a fait une bonne affaire, la banque qui touche sa commission et qui a conforté son image d’établissement sérieux qui ne propose pas de nanards à ses clients et enfin les actionnaires historiques - parmi lesquels se trouvent souvent les dirigeants de l'entreprise - qui en échange d'un relativement petit manque à gagner s''attirent le respect et la fidélité de leurs nouveaux actionnaires et enfin l'entreprise elle-même dont le nom n'est pas sali auprès de ses clients. Sauf que ce coup là tous ces grands principes ont été balancé par la fenêtre ou quelque chose d'autre a foiré.
Qui a merdé? Difficil á dire et peut-être ne le saurons-nous jamais. Il est évident que tous les acteurs de cette pièce vont se renvoyer la balle. La banque chef de file dira que le client est roi et le client dira que quand on touche des dizaines de millions de dollars de commission on ne peut pas prétendre être un simple exécutant.
D’après la presse, Mark Zuckerberg aurait été atteint du syndrome Guiness book of record, c'est-à-dire passer le cap symbolique des 100 milliards de dollars. Il pouvait le prétendre puisque l'engouement pour l'action semblait insatiable, le prix d'introduction ayant était plusieurs revu à la hausse. Le nombre de titres a aussi été revu à la hausse selon les souhaits du directeur financier de Facebook. Après tout tant qu'on trouve des couillons pour payer le prix demandé pourquoi se priver!
En plus il est connu qu'une IPO où le prix de l'action est réévalué à plusieurs reprise est plus le signe que les banques qui sont chargées de la commercialisation font un bon boulot de com et pas que la valeur de la société est revue à la hausse.
Les "petits" s'en sont sortis mieux que les gros
Non vous ne rêvez pas, les petits épargnants ont été épargné mais à l'insu de leur plein gré si j'ose dire. L'engouement pour le titre a été si fort que nombre d'établissements financiers ont voulu faire une fleur à leurs meilleurs clients - qui sont souvent les plus gros -. Le journal les Echos rapporte que chez Fidelity - le courtier bien nommé - "les actions du réseau social étaient réservées en priorité aux clients ayant au moins 500.000 dollars d'actifs ou ceux passant plus de 36 ordres par an avec la société."; La fidélité cela ne paie pas à tous les coups. Les banques chargées de l'introduction de la société californienne ont été accusées d'avoir informé les "très gros investisseurs" d'une réévaluation à la baisse à la dernière minutes. Disons que comme d’habitude celui qui se fait avoir n'est ni le petit ni le gros mais le moyen (si 500.000 dollars d'actifs sur un compte correspond pour vous à la définition de moyen).
Même les quatre market maker de FB sont dans la nasse et auraient perdu 100 millions de dollars suite aux conséquences de problèmes techniques sur le Nasdaq, la plate-forme boursière sur laquelle est coté le site.
Honnêtement peut-on parler fiasco quand une action perd 16,84% en une semaine? Un fiasco c'est quand un titre n'arrive pas à trouver preneur. Je parlerais plutôt d'une opération décevante, après tout la bourse c'est pas le jackpot à tous les coups sinon on arrêterait de se lever le matin à sept heure et on passerait sont temps devant son pc à boursicoter.
L'effet collatéral le plus notable de cet incident de parcours est qu'il risque de savonner la planche pour toutes les entreprises technologiques cherchant le chemin de la bourse mais seulement pour un petit moment, les marchés n'ayant pas généralement une mémoire d'éléphant et ne sont pas rancuniers.
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