Les nonistes au référendum français sur le traité pour la constitution européenne de 2005 en ont rêvé Olafur Ragnar Grimsson, le président islandais, l'a fait. Les Islandais seront appelés de nouveau à se prononcer sur l'accord voté par leur parlement pour mettre fin au conflit qui les oppose au Royaume-Uni et aux Pays-Bas concernant l'indemnisation des clients de la banque islandaise ICESAVE qui a fait faillite en 2008. Un an après avoir rejeté par une très large majorité de 93% le premier compromis trouvé entre les trois états.
Pourtant tout avait bien commencé pour le gouvernement islandais et le compromis était né sous une bonne étoile; les nouvelles conditions financières de l'accord étaient bien plus favorables que celles négociées un an plus tôt (comme je l'ai expliqué dans un récent article "Faillites bancaires: la dernière saga islandaise enfin traduite en français"), le texte venait d'être approuvé par une confortable majorité au parlement de 70% (le précédent texte avait tout juste recueilli 51% de oui) et il avait le soutient de 57% de la population d'après un récent sondage.
Petit aparté, le plus étrange et ironique dans cette histoire est que l'accord pour faire assumer les dettes d'une banque alors privée par l'état donc les citoyens est soutenu par un gouvernement d'alliance dominé par des socialistes avec l'appui des Verts, alors que sur le continent ce sont les premiers à tirer à boulets rouges sur les "banksters" et à dénoncer le sauvetage des banques avec l'argent public. Fin de l'aparté.
La décision du président islandais d'organiser un référendum n'est qu'un demie-surprise pour une raison simple; "Ce que Dieu a uni, nul homme ne peut le séparer" qu'on pourrait traduire en des termes démocratiques par "Ce que le peuple, libre et souverain, a rejeté une fois ne peut être approuver sans qu'il soit à nouveau consulté", donc en organisant un autre référendum. C'est pas du bon sens? On peut reprocher beaucoup de choses au président islandais mais pas son manque de constance et de cohérence. Notons par ailleurs que deux motions de l'opposition qui demandaient un référendum sur le nouvel accord avaient été rejetées par 33 voix contre et 30 voix pour; premier signe que même parmi les parlementaires qui avaient voté oui à l'accord un certain nombre désirait qu'il fût validé par le peuple.
Quelle sera l'issue de cette consultation?
Il n'est pas certain que l'accord soit de nouveau rejeté par les Islandais. D'abord si ils sont appelés à s'exprimer sur le même sujet (l'indemnisation des clients de la banque ICESAVE par l'état islandais) les conditions financières de l'accord sont bien plus favorables, à tel point qu'on imagine mal les Britanniques et les Néerlandais revenir à la table des négociations avec une meilleure offre, et de cela les islandais en ont bien conscience. Les Islandais sont aussi fatigués de cette mauvaise histoire qui n'en finit pas et beaucoup veulent tourner la page comme le montre les derniers sondages où le oui à un accord est toujours majoritaire.
Et si le NON l'emportait à nouveau?
Comme il est difficilement imaginable qu'un accord encore plus favorable soit trouvé les trois gouvernements se retrouveraient devant une impasse. La seule issue serait pour les deux royaumes de saisir la Cour internationale de justice de La Haye. Ils le feront d'autant plus volontiers que leur dossier parait bien plus solide que celui des Islandais. Bien sûr la procédure peut prendre beaucoup du temps mais à l'échelle d'un état 1, 5 ou 10 ans ce n'est pas grand chose. Des rétorsions pourraient par contre être prise immédiatement comme le véto aux versements des tranches de prêt du FMI dont l'Islande à tant besoin ou des mesures concernant la pêche qui représente 60% des exportations de l'île nordique.
Quid des clients de ICESAVE qui ont été indemnisés par les états du Royaume-uni et des Pays-Bas donc par les contribuables britanniques et néerlandais? Ils devraient en théorie rembourser ce qu'ils ont reçu, puisque les sommes versées représentaient une sorte d'avance de trésorerie dans l'attente d'un règlement de la part de l'état islandais. Cette mesure serait bien peut probable pour des raisons techniques et surtout politiques.
Encore plus que l'an dernier, le résultat du scrutin organisé par l'île de glace focalisera l'attention du monde entier car en cas de victoire du "non" beaucoup d'observateurs feront un parallèle avec les révolutions qui secouent le monde arabe en parlant de révoltes des peuples même si l'Islande n'est pas la Tunisie.
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